Ne demande pas à Dieu de te sortir d’un état pour t’utiliser dans un autre. S’il le voulait, Il se servirait de toi sans te changer d’état.
Une des attitudes vertueuses du connaissant en Dieu, c’est de se contenter de la connaissance apportée par Dieu, qui le permet de se dispenser de tout autre que Lui. Lorsque Dieu le met dans un état, il ne le rejette pas et ne cherche pas à s’en libérer pour en rejoindre un autre. Si Dieu voulait le sortir d’un état pour l’utiliser dans un autre, Il se servirait de lui sans qu’on lui demande de le faire. On doit rester là où le Réel l’a mis jusqu’à ce qu’Il soit Celui qui le sorte de l’état, tout comme Il l’a mis. “Et dis : O mon Seigneur, fais que j’entre par une entrée sincère et que je sorte par une sortie sincère…” (Coran 17 : 80)
L’entrée sincère, c’est l’entrée par Dieu ; la sortie sincère, c’est la sortie par Dieu. Voilà une compréhension venue de Dieu, et c’est le fruit de la réalisation de la connaissance divine. Si le connaissant en Dieu est célibataire, il ne souhaite pas se marier. S’il est marié, il ne souhaite pas divorcer. S’il est pauvre, il ne souhaite pas s’enrichir. S’il est riche, il ne souhaite pas s’appauvrir. S’il est puissant, il n’aspire pas au rabaissement et s’il est rabaissé, il n’aspire pas au pouvoir. S’il est contracté, il ne souhaite pas la dilatation et s’il est dilaté, il ne souhaite pas la contraction. S’il est fort, il ne souhaite pas la faiblesse et s’il est faible, il ne souhaite pas la force. S’il est domicilié, il ne souhaite pas le voyage et s’il voyage, il ne souhaite pas se domicilier. Et la même chose vaut pour tous les états. Il attend de voir ce que Dieu fera de lui et ne cherche pas par lui-même les moyens d’effectuer un changement d’état. Il est comme le mort entre les mains du laveur ou comme un stylo tenu par des doigts, comme le dit l’auteur du al-’Ayniyya :
Je me vois comme un instrument qu’Il manipule.
Je suis un stylo et les décrets sont les doigts !
Le Très-Haut dit : “Ton Seigneur crée ce qu’Il veut et Il choisit ; il ne leur a jamais appartenu de choisir”. (Coran 28 : 68). Il dit : “…vous ne saurez vouloir, à moins que Dieu veuille”. (Coran 76 : 30) Dieu révéla à Da’ud [David] : “Da’ud, toi tu veux et Moi Je veux, mais il n’y a seulement ce que Moi Je veux. Si tu abandonnes à Moi ce que Je veux, Je te donnerai ce que tu veux. Si tu n’abandonnes pas à Moi ce que Je veux, je t’épuiserai dans ce que tu veux, mais cela encore c’est Moi qui le veux”.
L’Envoyé de Dieu -sur lui la paix et le salut -a dit à Abu Hurayra : “L’encre est sèche pour ce qui est de ce qui t’adviendra”. Dans un autre hadith : “L’encre est sèche et les pages sont rangées”. Le shaykh de nos shaykhs, sidi Ahmad al-Yamani dit lorsque lui et ses compagnons furent interrogés sur la réalité de la sainteté : “La réalité de la sainteté, c’est lorsqu’une personne s’assied à l’ombre, il ne désire pas se mettre au soleil, et lorsqu’il est au soleil, il ne désire pas s’asseoir à l’ombre”.
Tout ceci vaut lorsque l’on a le choix, et non pour les choses vitales. Nous avons déjà mentionné ce qu’à dit le shaykh sidi ‘Ali : “Un des attributs du saint accompli, c’est qu’il n’éprouve le besoin que d’être dans l’état où son Maître l’a mis sur le moment”, c’est à dire qu’il n’a de volonté que dans ce qui émane de la Puissance divine et ne désire rien d’autre.
Lorsque le connaissant en Dieu reçoit une effluve seigneuriale (tajalli), c’est à dire lorsqu’il passe d’un état à un autre, il doit rester sur ses gardes et patienter jusqu’au moment où il voit que cela vient de Dieu, par un signe extérieur où bien par une voix intérieure. Il doit rester à l’écoute de ces voix. Dieu s’adresse à Lui par le biais qu’Il désire. Ce biais est valide, il a été maintes fois utilisé à l’égard des connaissants en Dieu : ainsi, ils ne sont mus que par la Volonté de Dieu et par Son Messager, car il n’y a aucune séparation chez les gens de l’unification. Que Dieu nous fasse comme ceux-là, Amen !
Tout cela vaut si l’état dans lequel tu es mis est conforme à la Shari’a. S’il ne l’est pas, alors cherche à le quitter par tous les moyens !
Puis il [Ibn ‘Ata- Allah] évoque la quatrième attitude spirituelle, qui est celle d’élever son aspiration (himma) au-delà des êtres et l’ascension constante à travers les stations de la connaissance spirituelle :
Jamais itinérant n’arrêta son aspiration à ce qui lui a été dévoilé, Sans entendre aussitôt les voix de la vérité : Celui que tu cherches est en avant ! Et si les apparences des créatures
font miroiter leur charme,Aussitôt leurs réalités profondes te crient :“Nous sommes une tentation, ne sois pas parjure”.